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ANR POLTEVERE

Contrat ANR Jeune Chercheur "POLTEVERE"

Référence projet : ANR-11-JSH3-0002

Porteur du projet : Jean-Philippe GOIRAN
Géo-archéologue - chargé de recherche CNRS, Archéorient

Contrat ANR Jeune Chercheur "POLTEVERE"

Jeunes partenaires principaux :

Ferréol Salomon (Université Lyon 2)
Hugo Delile (Université Lyon 2)
Matthieu Le Bailly (UMR 6249 Chrono-Environnement)
Olivier Planchon (UMR 6554 COSTEL-LETG)
Giullia Boetto (UMR 6573 CCJ)
Evelyne Bukovieky (EFR

 

Paléopollutions et paléoenvironnements dans les archives sédimentaires du delta du Tibre – archéologie environnementale

Entre le 1er s. av. J.-C. et le 2e siècle ap. J.-C., la pression urbaine est très forte dans la basse vallée du Tibre. Rome est la première ville occidentale à atteindre un million d’habitant. Aucune autre ville européenne n’atteindra ce chiffre avant le XIXe s. Pour nourrir une telle population, le port fluvial d’Ostie à l’embouchure du Tibre ne suffit plus. Il ne peut pas accueillir les grands navires de commerces à fort tirant d’eau. Entre le milieu du 1er s. ap. J.-C. et le début du 2e s. ap. J.-C., les empereurs Claude et Trajan font creuser deux bassins pour un gigantesque port maritime à 4km au nord d’Ostie. Autour des bassins, de nombreuses activités liées au port se développent. Ostie n’en est pas pour autant en déclin. Elle retrouve plutôt un renouveau. La majeure partie des vestiges de la ville antique d’Ostie que l’on peut visiter aujourd’hui date du 2e s. ap. J.-C. Cette forte pression urbaine (Rome, Ostie et Portus) a sans aucun doute générée tout un cortège de polluants dont certains ont été conservés dans les archives sédimentaires jusqu’à aujourd’hui. Au nombre des paléo-pollutions, on compte les paléo-pollutions chimiques (métaux lourds) et les paléo-pollutions biologiques (paléoparasites, helminthes et protozoaires intestinaux). Leur analyse nous permettra de connaître (1) la spécificité des rejets des villes antiques et (2) les impacts de ces villes sur leur environnement. Ce focus réalisé sur la période antique s’effectuera grâce à la combinaison de datations OSL, radiocarbone et archéologiques.

L’analyse de ces paléo-pollutions présuppose de trouver les pièges sédimentaires dans lesquels ils ont été conservés. Il est possible d’en distinguer deux types : (1) les pièges sédimentaires artificiels ; (2) les pièges sédimentaires naturels. Les pièges sédimentaires artificiels sont souvent situés à l’intérieur de la ville ou à proximité immédiate. Des sédiments préservés seront prélevés dans les réseaux d’assainissement antique de Ostie et Portus. Fort des premières campagnes de terrain, nous transposerons le savoir faire acquis pour réaliser des prélèvements à Rome dans la Cloaca Maxima (VIIe – VIe av. J.-C.). Les analyses en paléo-pollutions seront aussi effectuées avec précision sur les sédiments piégés dans les bassins portuaires de Portus et d’Ostie.

Au tournant de notre ère, la croissance importante de Rome se conjugue avec une crise hydro-climatique déjà repérée en de multiples sites d’études en Europe occidentale. Par des études paléo-climatiques et géoarchéologiques, nous essayerons de préciser les manifestations de cette crise climatique dans le bassin versant du Tibre et l’impact qu’elle a produit sur la dynamique fluviale en aval de Rome. Tout porte à croire que la mobilité latérale du Tibre ait été importante à cette époque. Des nouvelles formes sédimentaires ont certainement été produites par accrétion et exhaussement des convexités des méandres. Elles sont susceptibles d’avoir piégé les sédiments et la pollution véhiculée par les eaux. Le Tibre est ainsi considéré comme le vecteur des pollutions rejetées par la ville de Rome. Le delta du Tibre constitue dans son ensemble une mosaïque de milieu piégeage : faisceau de mobilité du Tibre dont nous venons de parler ; enregistrement des crues dans les lagunes ; progradation deltaïque. Les canaux reliant le Tibre à Portus sont aujourd’hui comblés et constituent de la même manière un piège (artificiel) pour les sédiments du Tibre.