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Axe 1 - Marqueurs biologiques et environnementaux

Axe 1 - Marqueurs biologiques et environnementaux

Responsables : Jean-Philippe Goiran et Sébastien Gondet

L’objectif des recherches menées dans l’Axe 1 – qui s’intéresse à l’étude des marqueurs environnementaux et, sous l’angle des marqueurs biologiques, aux populations humaines et animales – est de comprendre :

  1. l’évolution des environnements et leur transformation sous l’impact anthropique et les agents naturels
  2. l’exploitation des ressources environnementales par les sociétés anciennes
  3. L’influence de l’environnement sur les populations humaines et animales.

Ces recherches font appel dans certains cas aux outils et méthodes des sciences naturelles, à la géochimie, à la géophysique et à la pétrographie. Elles puisent largement dans le pôle des compétences de l’unité Archéorient en géographie, en géoarchéologie, en géomatique, en géophysique, en archéozoologie, en anthropologie biologique et en statistiques.

Trois programmes structurent cet axe :

Programme A -Marqueurs de l'évolution des paysages

  • Paléo-environnements et trajectoires paysagères

Cette opération vise à la reconstitution des paléoenvironnements pléistocènes, holocènes et « anthropocènes » tant continentaux (fluviaux, arides, semi-arides...) que littoraux, conjointement avec les opérations de fouilles et missions archéologiques qui sont menées dans les différents pays où les membres du laboratoire interviennent (Sénégal, Éthiopie, Tunisie, Italie, Grèce, Liban, Syrie, Oman...). L’accent est surtout mis sur l’analyse des formations alluviales et littorales pour une reconstitution extrêmement fine des événements qui se succèdent sous les actions combinées des fluctuations paléoclimatiques, de la transgression holocène et de l’impact des sociétés (activités de déforestation, de surpâturage, en régions sahéliennes et soudaniennes, ports et autres fonctions littorales, mise en œuvre de stratégies d’exploitation agricole en milieu montagnard...). L’attention est particulièrement portée sur les causalités anthropiques des modifications reconnues dans les formations (par l’analyse des stratigraphies et de carottes sédimentaires...) sur des « pas de temps » qui peuvent être très longs (préhistoriques/ pléistocènes), mais qui s’expriment surtout sur des chronologies holocènes et historiques.

  • Risques et stratégies d’adaptation

Cette opération cible les risques naturels et les risques dus aux activités humaines. Les sociétés peuvent être soumises, au cours de leur histoire à des catastrophes dont l’ampleur et la gravité pourraient avoir eu des conséquences sur leur choix d’implantation et/ou des développements de stratégies d’adaptation. Il s’agit d’étudier quels sont les risques-clés et leur récurrence dans les différentes aires culturelles étudiées par l’unité. Dans cette optique sont privilégiées les recherches portant sur :

  1. les traces des événements sismiques, des tsunamis, des glissements de terrain, des variations relatives du niveau marin et leurs conséquences environnementales.
  2. les changements / variations climatiques et leurs effets notamment dans les marges arides
  3. la surexploitation des écosystèmes, notamment le déboisement et le surpâturage avec leurs conséquences en termes de bilan érosion/accumulation : l’appauvrissement du couvert végétal naturel, le ravinement, l’évolution des paysages côtiers suite aux apports massifs de sédiments terrigènes (progradation deltaïque).
  4. la pollution métallique due aux activités humaines et ses conséquences sur l’environnement de l’homme.

Programme B - Gestion des ressources hydriques

  • Techniques et structures hydrauliques

Cette opération, conduite transversalement avec le programme 1 de l’Axe 3, s’intéresse particulièrement aux techniques mises en œuvre pour mobiliser ou gérer la ressource en eau qu’elle soit « pérenne » (fluviale, lacustre, phréatique) ou non « pérenne » (neige, pluie, écoulements saisonniers). Les recherches visent à identifier et caractériser les ouvrages destinés à collecter, emmagasiner puis utiliser, distribuer l’eau ou même l’évacuer : les puits, les citernes, les galeries, les canaux d’adduction, d’exhaure ou de drainage. S’y ajoutent les techniques et ouvrages destinés à gérer les sédiments apportés par les écoulements (colmatages agricoles, contrôle de l’érosion). L’approche typologique est associée à l’étude diachronique car les ouvrages ont pu changer de mode de construction ou de dimensions au cours du temps, être abandonnés, repris ou même ré-affectés. Ces recherches sont menées dans des contextes archéologiques très divers : espaces bâtis, approvisionnements domestiques ou publics, usages miniers, logistiques, artisanaux ou agricoles, voire récréatifs ou cultuels. Les analyses font appel à une information diverse : fouilles et relevés archéologiques, analyses sédimentaires, documents d’archives ou épigraphiques, photographies aériennes, enquêtes ethnoarchéologiques. Elles apportent une contribution décisive à d’autres opérations car les ouvrages hydrauliques sont indirectement un moyen de dater des sites, par l’étude des sédiments ou des concrétions qu’ils renferment. Ils permettent de percevoir des changements de l’environnement, par le biais de l’évolution de leur dimension, leur nombre ou leur localisation, ou par les marques de dégradation qu’ils présentent (paléocrues, paléosismicité...).

  • Ressources en eau : disponibilité et gestion

Complémentaire de l’opération précédente et en lien étroit avec l’axe 2 se concentrant sur les dynamiques d’occupation des territoires, cette opération est consacrée aux ressources en eau et à leurs usages dans différentes régions d’études (Péninsule arabique, plateau iranien, montagnes du Tigray en Éthiopie, marges arides du Levant et de Tunisie, vallée de la Falémé au Sénégal). Les changements environnementaux, qu’ils soient d’origine naturelle ou anthropique, impactent les différentes ressources hydriques disponibles. Le régime des cours d’eau, le niveau des aquifères, le débit des sources ainsi que l’intensité et la répartition annuelle des précipitations, donc du ruissellement, sont des paramètres essentiels pour comprendre les dynamiques d’occupation humaine. L’évolution de ces paramètres nécessite des adaptations techniques et peut provoquer de profonds changements dans les modes d’exploitation et d’occupation. Les contextes hydrographique et hydrogéologique d’une région sont à aborder par la combinaison d’approches cartographiques et sédimentaires. Par exemple, les études en géomorphologie fluviale (tracés des chenaux, style fluvial, formes des terrasses alluviales) permettent de retracer les grandes phases de l’histoire hydraulique d’une région. La diversité des ressources en eau implique des systèmes et des réseaux d’acquisition et de distribution distincts. Une analyse combinée de la ressource, des vestiges d’infrastructures et des données sur l’occupation permet de définir, à plusieurs échelles, ces différentes utilisations de l’eau au sein d’un territoire ainsi que leurs évolutions. L’organisation et la gestion de l’eau dans les sociétés anciennes en fonction de l’usage qui en est fait (eau de consommation, eau d’irrigation, transport fluvial...) font partie des questionnements menés dans ce programme.

  • Installations littorales et ressources marines

L’objectif est de développer une réflexion sur l’appropriation par les sociétés humaines du milieu littoral, milieu spécifique qui se trouve à la charnière de l’espace terrestre et de l’espace maritime. Il s’agit d’étudier les dispositifs mis en œuvre pour avoir accès à l’espace maritime et pouvoir utiliser des navires (transport et commerce maritime, pêche en haute mer) et exploiter les ressources marines (poissons, coquillages), voire les conserver (viviers à poisson...). Cette réflexion se fera principalement par l’étude des installations littorales en Méditerranée et par la façon dont les sociétés ont modifié ce littoral (construction de structures portuaires, carrières littorales, viviers...), ainsi que par les études sur les poissons et les coquillages eux-mêmes.

Programme C - Caractérisations biologiques des populations humaines et animales

  • État sanitaire et caractères biologiques des populations humaines

L’étude de l’état sanitaire et des caractéristiques biologiques des populations humaines sera poursuivie au Proche- Orient (Néolithique), dans le Sud Caucase (du Néolithique au Bronze récent) et en Arabie (période Tylos), au travers de l’étude des séries de restes humains produites par les fouilles conduites par le laboratoire (Mission archéologique à Bahrein, Mission de Dja’de el-Mughara) et de séries issues d’autres fouilles mais confiées à des membres d’Archéorient (Mission de l’Université libanaise à Tabarja Wata Slam 100, mission azéro-italienne de GARKAP).

Par ailleurs, le programme en cours sur les anémies (en collaboration avec le laboratoire de Géologie de Lyon), qui porte actuellement sur la population de Khirokitia (Chypre, 7e millénaire) sera étendu à d’autres populations néolithiques du Proche-Orient. La méthode d’identification des anémies, basée sur les rapports isotopiques du calcium dans les os humains, en cours de mise au point, sera appliquée à d’autres séries de Syrie et du Liban. Un projet sur l’ancienneté de la malaria au Proche-Orient, fondé sur l’analyse d’ADN ancien d’échantillons osseux provenant de Turquie, ébauché précédemment, sera repris en collaboration avec le laboratoire MIVEGEC de Montpellier et l’Institute for Mummy Studies de Bolzano qui a développé des techniques performantes pour l’identification de l’ADN du Plasmodium.

L’état sanitaire des populations du Proche-Orient sera également abordé à partir des textes médicaux mésopotamiens. Les travaux porteront sur la représentation clinique du système gastro-intestinal, qui sera confrontée à sa représentation symbolique dans les incantations thérapeutiques. Il s’agira d’analyser l’étiologie et la symptomatologie des maladies internes, telles qu’elles étaient perçues, ainsi que les remèdes proposés.

Enfin, des études spécifiques des marqueurs d’activité et des activités para-masticatrices seront conduites sur les séries néolithiques étudiées, ce type d’étude, susceptible d’apporter de nombreuses informations sur les comportements des populations n’ayant que très rarement été réalisé pour cette période au Proche-Orient.

  • Ostéologie et phénotypes des animaux domestiques et sauvages

Dans le cadre des recherches menées dans l’unité sur les pratiques de contrôle, d’élevage ou de transport des espèces animales en Méditerranée et dans le Proche et Moyen-Orient, le sud du Caucase, la Corne de l’Afrique et l’Égypte, cette opération se concentre sur

  1. l’exploitation des animaux et la gestion des troupeaux (sélection des individus ; choix de production)
  2. la mise en évidence de la mobilité des troupeaux sauvages (gazelles) et domestiques (moutons et chèvres)
  3. la caractérisation des populations et la mise en évidence des traits spécifiques du phénotype macroscopique des espèces animales (différenciation des races de mouton ; des bovins taurins et des zébus)
  4. la dynamique des populations (éléphants)

Ces recherches se basent sur l’ostéologie animale ainsi que les études d’anatomie comparée et de morphométrie et, pour approfondir certaines des approches analytiques en archéozoologie, elles s’appliquent à développer ou à approfondir des protocoles méthodologiques : les méthodes d’estimations des âges à partir des dents des mammifères (moutons et chèvres) et du squelette post-crânien des reptiles (crocodiles) ainsi que les traitements statistiques (données d’âge, données métriques), l’utilisation de la morphométrie géométrique bidimensionnelle et tridimensionnelle à partir de l’imagerie 3D (CT scan, scanner surfacique).

Les travaux sur l’évolution des races de moutons intègrent des collaborations avec des généticiens et des spécialistes des isotopes et des éléments-traces ainsi que l’élaboration de référentiels modernes : référentiels ostéologiques de races traditionnelles au Liban, en Éthiopie et en France.